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La pizza mérite-t-elle (vraiment) sa mauvaise réputation ?

La pizza mérite-t-elle (vraiment) sa mauvaise réputation ?

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(NBC)

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Par Robin Panfili

Publié le

Longtemps reléguée aux soirées foot ou aux soirs de disette, la pizza est en voie de réhabilitation.

La pizza a beau figurer parmi les plats les plus prisés des Français, et même dans le monde entier, elle n’échappe pas pour autant aux idées reçues. Longtemps, dans l’imaginaire collectif, on a davantage considéré cette spécialité italienne (et surtout napolitaine) comme un plaisir coupable que comme une alternative alimentaire saine. Un plat que l’on réservait aux soirées foot, aux apéros entre amis, où aux soirs de disette lorsque le frigo a mauvaise mine.

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Et pourtant, la pizza mérite mieux que ça. À quel moment a-t-on pu, nous Français (mais pas que), dénigrer à ce point ce mets à la puissance de réconfort (presque) inégalée, monument de la gastronomie italienne, fruit d’un savoir-faire unique ? Les pistes sont nombreuses, et pas à un paradoxe près. En France, et particulièrement à Paris, il aura fallu attendre de nombreuses années avant de voir débarquer des pizzas de qualité aux pâtes précieusement fermentées et garnies de produits dignes de ce nom.

Du match de foot…

“Il y a dix, quinze ans, les gens avaient beaucoup moins d’intérêt pour la pizza. Aujourd’hui, tout ça a bien changé, observe Graziella Buontempo, aux commandes de Da Graziella, l’une des pizzerias les plus réputées (et appréciées) de Paris. Il y a un effet de mode indéniable autour de la pizza, à l’image de ce que le burger a suscité quelques années plus tôt.” À Paris, les ouvertures de pizzerias sont si nombreuses qu’il devient même compliqué de trouver un pizzaïolo, ajoute-t-elle.

Un “big bang”, dit même Alexis (ou Pizza Crusader) qui chronique sur Instagram et sur YouTube une quantité incommensurable de pizzas. “La pizza a été considérée comme un plat cheap parce qu’on a longtemps dû se contenter de pizzerias pourries à Paris. On nous a par ailleurs éduqués à de la pizza surgelée surmontée d’emmental… c’est dire si on revient de loin.”

Une pizza à la Félicità. (© Club Sandwich)

Jusque-là, il faut dire que l’industrialisation de la fabrication de la pizza et les chaînes de restauration aux pizzas surgelées n’ont clairement pas aidé. Si la pizza est un plat qui plaît aux Français par sa simplicité et sa commodité, ce sont les industriels qui l’ont compris et anticipé en premier.

Aujourd’hui, avec le renouveau de la pizza d’inspiration napolitaine, l’intérêt pour la pizza et sa réputation sont en train changer, à vitesse grand V, notamment grâce à la prise de conscience environnementale grandissante du public, un effort sur le sourcing et la traçabilité des produits et matières premières.

… Au rendez-vous galant

En apprenant à apprécier la pizza à sa juste valeur, et non plus seulement comme une solution de soirs de flemme, les Français l’ont donc fait entrer dans une nouvelle dimension. La pizzeria n’est plus le plan B qu’elle a pu être, mais un restaurant à part entière où l’on vient passer du temps entre amis, en famille, et même en couple. “Sortir en amoureux autour d’une burrata, de bon vin et d’une belle margherita, c’est aussi sexy que la scène de La Belle et le Clochard avec les pasta”, ironise Alexis.

Graziella Buontempo l’a également observé dans son établissement.“Quand j’ai ouvert ma pizzeria à Paris, je n’imaginais pas que des gens viendraient y fêter la Saint-Valentin. Et pourtant, trois semaines avant la date fatidique, on croule sous les appels. C’est fou”, constate-t-elle.

“Pour moi, en tant qu’Italienne et Napolitaine, la pizza n’a jamais eu mauvaise réputation, mais je suis contente de voir que même en France, on s’ouvre au bonheur que peut procurer une bonne pizza.”

Depuis deux ans, elle observe cette réhabilitation de la pizza jusque dans sa boîte mail. “On ne m’a jamais autant demandé de conseils et d’adresses à Naples. Je reçois des messages tous les jours, alors qu’on a longtemps résumé Naples aux vols, à la saleté…” Si la beauté naturelle de Naples et de son golfe y est pour beaucoup, la pizza et la gastronomie de la région n’y sont pas non plus étrangères. “Aujourd’hui, l’une des raisons qui détermine un choix de voyage, c’est aussi la gastronomie. Et la pizza a pu figurer comme une porte d’entrée vers cette ville.”

(Pixar / Disney)

Réalité nutritionnelle

En quelques années seulement, les (bonnes) pizzerias parisiennes ont ainsi su transformer la dégustation d’un plat finalement assez simple et modeste en véritable expérience. “Sur ce coup, on doit tout à Big Mamma, reconnaît Alexis. Ils ont su inventer des lieux sympathiques, des endroits chaleureux où tu peux boire un cocktail avec ta pizza. À la fin, tu t’en sors pour un peu plus cher, mais tu as une expérience complète.”

Mais au-delà des idées reçues qui ont la dent dure, la terne réputation de la pizza en France tient aussi à une réalité nutritionnelle. Et pour cause, on a longtemps perçu les pizzas comme des bombes caloriques. “Il y a eu une grande prise de conscience chez les restaurateurs qui vont de plus en plus opter pour des produits de meilleure qualité pour leurs pizzas. Mais il faut bien garder en tête que ce n’est pas parce que c’est bon que c’est forcément moins calorique”, note la diététicienne et autrice Ariane Grumbach. Dans son approche de la nutrition, elle a pris l’habitude de conseiller à ses patients de se faire plaisir dans leur alimentation, mais de manière raisonnée.

“Manger une pizza, ce n’est pas grave. En fait, aucune nourriture occasionnelle n’est grave. Il n’est pas nécessaire de forcément la remplir de légumes pour se sentir moins coupable. L’essentiel est d’en manger à fréquence raisonnable, dans une alimentation variée et équilibrée.”

Et au moment de déguster une pizza, faites appel à votre sens de la mesure. Nul besoin de manger plus que de raison, nul besoin d’ajouter à une pizza des suppléments à outrance. “Il ne faut pas hésiter à demander d’où viennent les ingrédients. Quand le sourcing est bon, on limite grandement la casse”, conclut Alexis. Car si une pizza n’est pas mauvaise par essence, elle peut le devenir. Et, souvent, on ne peut en vouloir qu’à soi-même.

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