Pourquoi la pêche illégale des concombres de mer explose en Europe ?

Pourquoi la pêche illégale des concombres de mer explose en Europe ?

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Par Hong-Kyung Kang

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Une espèce très demandée dans certains pays, sa disparition aurait des graves conséquences sur les écosystèmes marins.

Une nouvelle ressource qui est exploitée de manière excessive. Wired relaie que les holothuries, aussi appelées “concombres de mer”, sont très prisées dans certains pays d’Extrême-Orient pour leur goût mais également leurs prétendues propriétés aphrodisiaques. Alors que les ressources halieutiques de l’océan Pacifique ont drastiquement chuté, le braconnage des concombres de mer se multiplie actuellement dans les eaux européennes, mettant ainsi en péril de nombreux écosystèmes marins.

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Jusqu’à récemment, le marché des concombres de mer était restreint à l’océan Pacifique et à l’océan Indien. Cependant, l’augmentation de la demande, notamment due à la croissance de la classe moyenne de pays comme la Chine, a généré une surpêche dans la région, épuisant ainsi les ressources locales. La pêche des holothuries s’est donc développée dans des endroits où elle n’est pas encore clairement régulée, comme en mer Méditerranée et au nord-est de l’océan Atlantique.

Des bandes de braconniers se rendent donc sur les plages, en Espagne notamment, à l’heure de la marée basse, pour ramasser ces petits animaux marins. Évidemment, toute cette procédure se fait en essayant d’éviter les gardes-côtes qui patrouillent régulièrement. Concrètement, c’est près de 10 000 tonnes de concombres de mer, soit environ 200 millions d’animaux, qui sont ainsi pêchées et vendues à travers le monde.

Et les répercussions de telles pratiques sur la biodiversité sont graves. Selon Steven Purcell, expert des holothuries à la Australia’s Southern Cross University, ce serait près de 70 % des ressources mondiales qui auraient déjà été surexploitées en 2011. Si des pays comme la Turquie ou l’Italie ont commencé à réguler la pêche des concombres de mer, en instaurant des quotas, ou en suspendant temporairement l’activité, ce n’est pas le cas de l’Espagne, où a lieu une grande partie du braconnage.

En effet, la population espagnole ne consommant pas de concombres de mer, le gouvernement n’avait pas jugé utile de réguler la pêche de cette espèce. Résultat, les côtes de la péninsule ibérique sont désormais investies de braconniers. Par exemple, la ville de Cádiz est devenue un spot de pêche de masse en 2016.

Les écosystèmes marins en grave danger

Il faut savoir que les holothuries se reproduisent via une fécondation externe, c’est-à-dire que les mâles projettent directement leur semence sur les œufs. Alors que les spécimens en âge de procréer sont victimes de surpêche, il y a forcément de moins en moins d’individus pour féconder les œufs.

Les concombres de mer jouent en outre un rôle crucial de nettoyeurs des océans. En effet, ils se nourrissent des petits déchets organiques des fonds marins et les éjectent sous forme de sable après avoir digéré les bactéries. L’extinction des holothuries aurait donc des conséquences désastreuses sur les écosystèmes marins.

Et la disparition des concombres de mer est désormais visible concrètement à échelle humaine. La biologiste Mercedes González-Wangüemert a remarqué, en été 2018, que seulement 2 individus par hectare peuplaient les lagunes de la Ria Formosa, au sud du Portugal, là où elle en avait observé près de 200 par hectare six mois plus tôt.

Durant ces quatre dernières années, les gardes-côtes ont accru leur surveillance des plages, notamment au printemps, saison où l’eau est chaude et calme, qui est donc propice au racolage. Résultat : plusieurs dizaines de milliers d’animaux ont été saisis. Si un abus total de surpêche peut valoir une amende de près de 60 000 euros, aucune peine de prison n’est pour l’instant prévue.

Un avenir encore incertain pour les concombres de mer

Le 24 février 2020, la Chine a décrété l’arrêt du commerce et de la consommation d’animaux sauvages, afin d’éviter que l’épidémie du coronavirus ne se propage. Une prise de mesure qui ne concerne cependant que les espèces déjà protégées par la loi, les pêcheurs de concombres de mer pourraient donc passer entre les mailles du filet dans certaines régions du monde.

Selon l’expert González-Wangüemert, l’élevage pourrait être une solution afin d’arrêter les besoins de surpêche. Cependant, les concombres de mers ont besoin de larges espaces dans des eaux peu profondes pour prospérer, et les installations nécessaires à leur élevage pourraient obstruer les littoraux, empêchant ainsi les navires de circuler.

En 2019, l’entreprise de González-Wangüemert a obtenu une licence pour aménager une zone dédiée à l’élevage d’holothuries dans un estuaire près de Cádiz. Le but est de créer le premier site d’élevage de concombres de mer en Europe. Ces derniers auraient en outre, selon l’expert, des nutriments capables de lutter contre les cellules cancérigènes. Quoi qu’il en soit, la priorité est de préserver les écosystèmes marins.

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