On s’est incrusté dans les cuisines cachées (et les sous-sols) de Roland-Garros

On s’est incrusté dans les cuisines cachées (et les sous-sols) de Roland-Garros

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© Anne-Christine Poujoulat/AFP

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Par Robin Panfili

Publié le , modifié le

Le ventre de Roland-Garros s’agite juste en dessous des courts. Et on est allés voir ça de plus près.

À première vue, on n’y voit que du feu, ou alors seulement de la terre battue. Et pourtant, juste en dessous des joueurs qui hurlent en exécutant leurs meilleurs coups droits, c’est un monde parallèle qui s’agite dans la plus grande discrétion. Juste quelques centimètres en dessous des terrains principaux du tournoi, les courts Suzanne Lenglen et Philippe Chatrier, c’est le ventre de Roland-Garros qui vivote, chaque jour, durant toute la quinzaine de la compétition, sans que personne ne s’en aperçoive.

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Chaque jour, dans le bazar très organisé de Roland-Garros, la brigade XXL de près de 250 personnes se mobilise pour préparer jusqu’à 6 000 repas, du petit-déjeuner au déjeuner en passant par les cocktails dînatoires pour les sessions du soir. “Au total, sur les quinze jours du tournoi, ce sont près de 90 000 de repas qui sont servis. C’est un peu fou quand on y réfléchit et qu’on prend du recul”, sourit la cheffe Marie Soria, à la tête de cette gigantesque fourmilière. Depuis près de trente ans, Marie Soria a toujours été une fidèle de la maison, jusqu’à devenir, aujourd’hui, la cheffe des cuisines de Potel et Chabot.

Pour tenir le rythme et la cadence de l’événement, Marie Soria a su s’entourer de “bras droits” indispensables. Il y a Marc Rivière, le chef pâtissier, et les autres : Francisco, capable “de gérer un stade”, “ce qui n’est pas donné à tout le monde”, Emmanuel “qui parcourt le tournoi avec son thermomètre à sonde et veille aux cuissons sur l’ensemble des cuisines”, Sabrina, cheffe venue de Shanghai, ou Benjamin, en charge des menus végans et végétariens. “Un tel tournoi exige une logistique énorme et une organisation parfaite”, dit la cheffe.

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Devant un four réglé à 51 °C, et pas un degré de plus, elle surveille le skrei du jour, un poisson venu du grand Nord. “La plus grande difficulté, c’est de garder la même qualité et la même exigence sur les soixante espaces de restauration de Roland-Garros”, poursuit-elle. “La cuisson d’un poisson ou d’un légume doit être la même d’un bout à l’autre du tournoi. Et les assiettes absolument identiques. C’est contraignant, mais c’est ce qui fait notre force et notre savoir-faire.”

Durant la quinzaine, les menus changent tous les jours. “Jamais un visiteur ne mangera deux fois la même chose”, assure Marie Soria. Mais cette condition impose une organisation millimétrée. Les menus sont élaborés en décembre, des mois avant le début du tournoi, afin de faire en sorte que les producteurs et les maraîchers puissent anticiper les commandes. Une fois les fruits, légumes et victuailles rapatriés à Paris, ils sont d’abord amenés dans l’Ouest parisien avant d’être apportés sur le tournoi. “Les cuisines de Roland-Garros sont grandes, mais pas assez pour gérer cette phase de mise en place. Ici, sur le tournoi, on s’occupe essentiellement de l’envoi, et c’est déjà pas mal”, sourit la cheffe.

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Ce jour-là, c’était les asperges blanches du Val de Loire qui étaient à l’honneur, accompagnées d’une gaufre feuilletée surmontée de burratina et de skrei. Selon les endroits du tournoi, on la retrouvait en salade, en cocktail ou en petites bouchées, mais toujours avec les mêmes ingrédients. “On ne doit rien laisser au hasard”, répète la cheffe. Et sa brigade s’y tient. Ce n’est donc peut-être pas un hasard si Potel et Chabot tient les cuisines de Roland-Garros depuis plus de trente ans désormais.