Pourquoi la visite de Macron dans une exploitation de tomates ne passe pas

Pourquoi la visite de Macron dans une exploitation de tomates ne passe pas

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© STEPHANE MAHE/AFP

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Par Robin Panfili

Publié le

Une "autre" agriculture existe, et il est plus que jamais temps de la mettre en avant.

C’est une visite qui a du mal à passer dans le monde paysan. En déplacement en Bretagne, le 21 avril, le président Emmanuel Macron a voulu remercier en personne “la France qui tient” et la “deuxième ligne” face à l’épidémie du coronavirus. Si l’intervention aurait pu être bienvenue après plusieurs semaines d’efforts et de sacrifices, celle-ci a été relativement mal perçue par une grande partie du secteur agricole. Et pour cause, c’est dans une exploitation XXL qu’Emmanuel Macron a choisi de se rendre : celle des frères Roué, maraîchers depuis cinq générations au sein de la coopérative SICA Saint-Pol-de-Léon.

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Une “ferme” spécialisée dans la culture de tomates hors-sol, en hydroponie, dans des serres chauffées tout au long de l’année. “En Bretagne, des tomates cultivées hors sol et hors saison sous serres chauffées toute l’année puis vendues en grande surface n’incarnent pas le nouveau modèle agro-alimentaire que le président Macron nous a demandé d’imaginer pour un autre monde collaboratif et éthique”, a regretté le chef Olivier Roellinger, installé à Cancale (Ille-et-Vilaine). 

“Un autre monde éthique”

À l’image de cette exploitation, la Bretagne s’est imposée en quelques années comme le premier producteur en France de tomates. Mais, faute de température et d’ensoleillement suffisants, les agriculteurs font ainsi appel aux serres chauffées pour compenser. Cet éclairage artificiel a pour conséquence d’importantes nuisances nocturnes et un impact non négligeable sur l’environnement et la biodiversité, comme l’expliquait Libération. Pour rappel, une tomate cultivée sous serre chauffée émet jusqu’à 7,3 fois plus de gaz à effet de serre qu’une tomate cultivée en pleine terre, selon l’Ademe.

Dans une période où les petits producteurs peinent à survivre, faute de main-d’œuvre et de restaurants pour écouler leur production, ce choix interroge. N’y avait-il pas mieux à faire ? N’y avait-il pas d’autres exploitations à aller visiter et remercier ? Partout sur son territoire, de Menton à la Bretagne en passant par les massifs vosgiens et les plaines de l’Aubrac, la France a la chance de pouvoir compter sur des producteurs extrêmement talentueux, garants d’une cuisine et d’une gastronomie que le monde nous envie, ceux-là même auxquels le ministre de l’Agriculture voulait venir en aide en lançant “un grand appel” à rejoindre les champs.

Dans son allocution du 12 mars 2020, le président Macron avait évoqué le “jour d’après“. Ce “jour d’après quand nous aurons gagné, ce ne sera pas un retour aux jours d’avant”, celui où “nous serons plus forts moralement”, où “nous aurons appris”. Ce jour où, lui comme nous, saurons “en tirer toutes conséquences, toutes les conséquences”. Sauf que ce jour d’après, c’est déjà aujourd’hui. Et le temps presse.

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