“L’émission a été la décharge électrique dont j’avais besoin” : entretien avec Tania de Top Chef

“L’émission a été la décharge électrique dont j’avais besoin” : entretien avec Tania de Top Chef

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© Marie Etchegoyen/M6

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Par Emma Couffin

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La jeune cheffe sarde de 29 ans revient sur son parcours dans Top Chef.

De Gordon Ramsay à Sébastien Gravé, du Forte Village Resort au Ritz, Tania Cadeddu a travaillé aux côtés des plus grands noms de la gastronomie. Notre candidate sarde favorite de cette treizième saison de Top Chef évoluait dans la brigade de Glenn Viel aux côtés de Lucie et Arnaud. Malgré sa détermination et une envie débordante, son “Chou trop chou” lui aura coûté sa place dans l’aventure, lors de l’épreuve de la dernière chance. On a fait le bilan, calmement.

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Konbini food | D’où vient cette passion de la cuisine au départ ?

Tania | Depuis que je suis petite, avec ma tante, on fait les repas de Noël, je l’ai toujours aidée… C’est elle qui m’a dit un jour : “Pourquoi ne pas tenter l’école hôtelière ?” Donc je me suis lancée. Au fur et à mesure des expériences, une véritable passion est née. Ma toute première expérience, c’était dans une auberge. On faisait de la cuisine classique sarde : du cochon à la broche, de la charcuterie maison, c’était super chouette.

Comme j’avais étudié l’histoire du Ritz, de la Tour d’Argent, etc. à l’école, j’ai toujours eu cette envie d’être une femme indépendante, de voyager et de découvrir une nouvelle langue, une nouvelle culture. J’ai donc débarqué en France. Mes débuts, c’était à La Table Lauriston, un restaurant de luxe, je galérais avec le français au début, c’était incroyable.

Ensuite, je suis partie chez Sébastien Gravé, puis au Ritz, qui m’a apporté énormément de choses. Je suis devenue la première femme dans l’histoire du Ritz à être responsable de nuit. C’était vraiment dur, mais c’était super enrichissant. Et un jour, j’apprends qu’il y a une place disponible chez Vida, aux côtés du chef Juan Arbelaez, et je me dis : “Pourquoi pas ?”

“Pour aller loin dans Top Chef, il faut savoir s’adapter rapidement”

Comment es-tu arrivée à Top Chef ?

J’avais prévu l’année dernière de rentrer chez moi, en Italie, d’ouvrir mon restaurant car ça fait presque dix ans que je suis à l’étranger. Un jour, je reçois un message Instagram de la chargée de casting de Top Chef. Tout le monde m’a dit : “Vas-y fonce !” C’est vraiment le hasard qui m’a amenée à Top Chef, car je me m’attendais pas du tout à cette proposition. Je n’avais pas envie d’avoir de regrets, j’ai fait les sélections, mais je ne m’attendais pas à être prise…

Tu peux revenir sur l’épreuve du dessert de la mer d’Ángel León ? Avec Arnaud, vous avez imaginé un parcours culinaire, raconte-nous.

C’était un gros défi, même pour des cuisiniers aguerris. L’idée était d’apporter de l’iode et du sucré dans une assiette. Avec la glace, on a cette possibilité : on a présenté une glace avec un carpaccio de saint-jacques et du sucre brûlé au chalumeau pour faire une assiette qui s’apparentait à un dessert. C’était un trois-services avec un bouillon qui rappelait la marée basse. Ces trois éléments devaient stupéfier le chef.

Glenn Viel choisit de t’envoyer en dernière chance. Qu’est-ce qui a pêché, selon toi, sur cette épreuve du chou ?

Le fait d’avoir re-cuit mes gnocchis car, pour éviter de faire manger les assiettes froides au chef, on doit faire un dressage juste avant la dégustation, en deux minutes. Je n’ai pas réfléchi au fait de re-cuire les gnocchis, je les ai réchauffées et c’est ce qui m’a fait perdre ma place… Pour aller loin dans Top Chef, il faut savoir s’adapter rapidement : plus tu t’adaptes rapidement, plus tu vas loin.

Que retiens-tu de ton aventure sur Top Chef ?

J’en ressors avec un gros sourire parce que c’est une expérience tellement enrichissante. On venait tout juste de sortir du confinement, les gens créatifs comme moi ont été coupés dans leur créativité. J’étais frustrée par rapport au Covid : on a dû s’adapter aux circonstances et faire une cuisine plus “fast-food”. On ne pouvait faire que des plats à emporter, il n’y avait pas de menus dégustation.

Top Chef a été la décharge électrique dont j’avais besoin. Ça a été un déclic. Ça fait tellement de bien d’échanger avec d’autres gens passionnés, c’était très enrichissant. Je pense que c’est une expérience que chaque cuisinier doit connaître. C’était très intense, ça faisait quatre semaines qu’on était tout le temps ensemble à l’hôtel. C’était vraiment une expérience unique.

“Le resto, c’est comme l’opéra : le chef d’orchestre guide les gens qui jouent et les autres travaillent pour faire passer une expérience au client”

Avant l’émission, tu pensais choisir quel·le chef·fe ? Comment ça s’est passé avec Glenn Viel, ton chef de brigade ?

Avant d’arriver dans l ‘émission, c’était déjà un grand honneur de travailler avec des monstres de la gastronomie. Je ne pensais pas avoir à choisir, donc quand Etchebest m’a demandé qui je choisirais, j’ai dit que je ne pourrais pas, c’était déjà tellement gros d’être là… Il m’a répondu : “Tu sais Tania, faut choisir dans la vie”, et il a eu raison. En dernière chance, lors de la première émission, je devais choisir entre Paul Pairet et Glenn Viel.

Le chef Etchebest est celui qui m’impressionne le plus. Il est très pragmatique, il te comprend direct, c’est un super chef. Quand j’ai été éliminée, il m’a dit que j’étais une personne solaire, il me décrivait très bien alors qu’on ne se connaissait pas depuis si longtemps. Quant à Glenn Viel, c’est un vrai leader, il nous pousse vers le haut. Son mantra c’est “on ne lâche rien”, il le répète tout le temps. Il était dégoûté quand je suis partie, il tient à chacun de nous, c’est une personne très humaine.

Quels sont les chefs qui t’inspirent le plus ?

Ça fait trois ans que Juan Arbelaez [ancien candidat de Top Chef et propriétaire de son restaurant, Vida, ndlr] et François-Laurent Apchié me poussent vers le haut. Le chef italien Davide Scabin m’a inspirée au niveau végétal notamment. J’adore aussi le travail de Yotam Ottolenghi. Après, il y a Anne-Sophie Pic que j’admire, il y a notamment un de ses livres que j’adore. Sébastien Gravé m’inspirait beaucoup quand je travaillais chez lui.

Comment tu décrirais ta cuisine ?

J’essaie d’être polyvalente dans ma cuisine, je me mets constamment au défi. Aujourd’hui, c’est devenu un défi de faire une cuisine différente, healthy… J’ai eu la chance d’avoir des clients végans et végétariens, du coup je me suis lancée dans des menus dégustation qui s’adressent à tous. Le cuisinier d’aujourd’hui doit se lancer des défis selon le goût du client.

Dans un an et demi, j’ouvrirai un restaurant en Sardaigne. Je ferai le tour des primeurs, des bouchers, des poissonniers : l’idée, c’est de développer une cuisine de marché avec les touches que j’ai apprises dans ma carrière. Je dirais que je veux développer une cuisine italo-française avec des influences colombiennes.

Tu dirais quoi à quelqu’un qui veut tenter Top Chef ?

Je dirais ce que m’a dit Juan Arbelaez : de profiter à fond et de laisser libre cours à sa créativité.